4 – Pour aller plus loin

Table des matières

Cette partie a pour but de parler du rôle des studios et du nôtre pour soutenir ceux qui font le plus d’efforts pour contribuer à une diminution des pratiques énergivores dans la production et la consommation. Ces conseils n’étant pas pratiques et donc peu applicables facilement, nous avons décidé de les traiter dans une partie à part, non intégrée au flyer. Cependant, c’est pour nous une problématique importante qui nécessitait que l’on y consacre du temps.

3,2 milliards, c’est le nombre de gens pratiquants le jeu vidéo dans le monde [1] en 2022. Un chiffre qui s’approche beaucoup de la moitié de la population. Ce nombre pourrait grandir rapidement à mesure que les générations se succèdent, et que le numérique continue à se développer mondialement.

Pays jouant le plus aux jeux vidéo, source Statista

184 milliards de dollars, c’est le revenu généré par l’industrie du jeu vidéo en 2022. S’il est en baisse par rapport à 2021 (192 Mds$), cela reste des sommes considérables à l’échelle mondiale. En France, selon le dernier classement réalisé en 2019, c’est la deuxième industrie culturelle [2], derrière les livres.

Avec une portée aussi grande, il est évident que le jeu vidéo a un très grand impact culturel sur le monde. C’est donc un très bon média pour pouvoir faire passer des messages et transmettre des problématiques environnementales et sociales.

[1] – Stephen Totilo, “Report: Video game revenue shrinks in 2022, snapping growth streak”, Axios, 15/11/2022 (consulté le 14/09/2024)
[2] – Servane Courtaux et Thaïs Brunel, “Inconsolables”, LundiCarotte, 15/04/2019 (consulté le 14/09/2024)

1 – Qu’est-ce qu’un studio engagé ? Quelles sont les formes communes d’engagement ?

Pour les studios, il y a plusieurs leviers d’engagement sur lesquels agir [1]. La plupart sont intrinsèquement liés mais on peut néanmoins dégager deux grandes catégories. 

La première est directement inhérente au studio, son empreinte carbone et globalement les conséquences environnementales liées à son fonctionnement.

La seconde correspond aux messages et aux biais culturels que leurs jeux transmettent directement.

Ce sont deux formes d’engagement qui ont chacun un impact très important même si ce n’est pas dans le même champ d’action.

On définit alors les studios engagés comme les studios qui mettent en place des mesures pour réduire leur empreinte carbone et/ou qui essaient de faire passer des valeurs écologiques ou sociales dans leurs jeux – ce qui n’est heureusement pas incompatible avec le fait de créer un bon jeu en soi ! Bien des œuvres reconnues qui ont eu un grand succès évoquent ce type d’enjeu avec une impressionnante maîtrise du média qu’elles utilisent, exploitant leur narration, leur univers visuel, voire leur gameplay pour distiller des réflexions tout en plongeant le public dans une expérience prenante. Si vous voulez en savoir plus sur les champs d’action d’où les studios peuvent agir, vous pouvez consulter l’Eco Guide du jeu vidéo [2] par l’équipe derrière Jyros [3], l’outil permettant de calculer son empreinte carbone pour les studios, ou encore le guide de l’Écran d’après [4], auquel Game Impact a eu l’honneur de contribuer.

[1] – Arnaud Fayolle, “Climate Game Toolkit for Content Creator (GCF 2022)”, Arnaud Fayolle, 05/09/2022 (consulté le 14/09/2024)
[2] – Geoffrey Marmonier, Louis-Raphaël Malbois, Pierre Forest et Mathilde Yagoubi, “Eco Guide du Jeu Vidéo 2024”, Jyros, 07/2024 (consulté le 14/09/2024)
[3] – “Jyros, l’outil qui vous permet de mesurer l’impact environnemental de votre entreprise”, Jyros (consulté le 14/09/2024)
[4] – “L’écran d’après : des contenus pour un futur désirable”, L’écran d’après (consulté le 07/03/2025)

2 – Comment définir un studio engagé ?

On a défini globalement ce qu’était un studio engagé, maintenant il convient de déterminer si tel ou tel studio est engagé ou non, et cela peut vite s’avérer complexe.

Les géants de l’industrie sont les plus connus et ils ont donc beaucoup de regards portés vers eux. C’est pourquoi ils se positionnent très souvent en faveur de la transition écologique en faisant miroiter des émissions carbones neutres entre 2030 et 2050. Ce sont des entreprises qui communiquent largement dessus comme Microsoft [1], Sony [2] ou Nintendo [3]. Bien que ces mesures soient un premier pas bienvenu, nous pensons qu’elles ne sont pas suffisantes au vu de l’ampleur du dérèglement climatique.

En effet, de nombreux discours tendent à faire penser que les industries du numérique peuvent devenir neutres en carbone. Mais plusieurs études de spécialistes à ce sujet montrent que ceci relève surtout de comptabilité économique déconnectée des réalités physiques, et la neutralité carbone ne saurait être atteinte sans des changements radicaux dans nos modes de consommation. D’autant plus qu’à l’inverse, on constate que certains nouveaux phénomènes comme l’IA nous font nous éloigner de plus en plus de ces objectifs de neutralité carbone. D’ailleurs, l’explosion de l’IA et de la consommation qu’elle engendre amène déjà les gros acteurs de la tech à assumer leur abandon des engagements climatiques qu’ils avaient pris. Greenwashing, quand tu nous tiens !

Récemment, le Parlement européen [4] a établi de nouvelles règles face aux allégations de marketing environnemental. Il sera intéressant de suivre de près les événements à venir pour vérifier les engagements de ces studios.

Pour les studios plus modestes, il est très difficile de trouver des informations concernant les mesures prises pour réduire l’empreinte carbone. Il faut souvent se fier à ce que les studios communiquent sur leurs réseaux. L’Eco Guide [5] de Jyros peut également aider.

Il est en revanche plus simple de voir si un jeu propose une expérience essayant de raconter des récits progressistes. Encore une fois il y a différentes façons de s’engager à travers son jeu [6]. De même qu’il y a beaucoup de sujets différents pouvant être abordés d’encore plus de façons. Gamesplanet a mis au point des Eco-Tags [7] permettant de voir rapidement les jeux avec un propos progressiste (en suivant ce lien [8], tous les jeux listés avec leurs 4 Eco-tags cochés). On peut citer notamment des jeux comme Alba: A Wildlife Adventure, ABZU ou encore Terra Nil.

[1] – “Xbox is the first console platform to release dedicated energy and carbon emissions measurement tools designed for (and with) game creators”, Microsoft Game Dev Blog, 22/03/2023 (consulté le 14/09/2024)
[2] – “Sony accelerates target to achieve a zero environmental footprint by ten years”, Sony, 18/03/2022 (consulté le 14/09/2024)
[3] – “4 Priority Areas”, Nintendo CSR Information, 27/06/2022 (consulté le 14/09/2024)
[4] – Maris Kurme et Dana Popp, “Greenwashing: comment les entreprises de l’UE peuvent valider leurs allégations écologiques ?”, Actualité Parlement Européen, 14/02/2024 (consulté le 14/09/2024)
[5] – Geoffrey Marmonier, Louis-Raphaël Malbois, Pierre Forest et Mathilde Yagoubi, “Eco Guide du Jeu Vidéo 2024”, Jyros, 07/2024 (consulté le 14/09/2024)
[6] – Arnaud Fayolle, “Climate Game Toolkit for Content Creator (GDC2022)”, Arnaud Fayolle, 06/05/2022 (consulté le 14/09/2024)
[7] – “A quoi servent les Eco Tags ?”, Gamesplanet Eco Lab (consulté le 14/09/2024)
[8] – “Gamesplanet jeux triés par eco tag”, Gamesplanet (consulté le 07/03/2025)

3 – Pourquoi soutenir les studios engagés ?

Dans un contexte récent où beaucoup de studios ferment définitivement faute de revenus pour continuer (2024 était historique [1] [2], et 2025 semble battre le record [3]), soutenir les créateurs qui sont le plus engagés dans les thématiques progressistes est un réel levier que tous les joueurs et joueuses peuvent actionner. Soutenir les studios engagés permet de montrer notre volonté d’avoir une industrie plus saine, en achetant leurs jeux mais aussi en les soutenant activement sur les réseaux. De plus, acheter des jeux aux contenus plus engagés permet de prouver qu’ils fonctionnent. L’objectif étant de démocratiser ces jeux auprès du grand public afin d’accroître leur portée.

Un autre point concerne aussi directement les joueuses et joueurs. Soutenir des jeux qui représentent correctement la diversité par exemple permet au plus grand monde de mieux s’identifier. Game Impact a d’ailleurs sorti un guide [4] sur comment mieux représenter la diversité dans les jeux.

[1] – Zack Zwiezen et Kenneth Shepard, “89 Days Into 2024 And 8,800+ Video Game Layoffs Have Been Announed”, Kotaku, 28/02/2024 (consulté le 14/09/2024)
[2] – Elisa Rahouadj, “Jeu vidéo : combien de licenciements depuis le début de l’année ?”, Journal du Geek, 25/03/2024 (consulté le 14/09/2024)
[3] – @dekaf, “Game Industry Layoffs” (consulté le 07/03/2025)
[4] – “Guide pour l’écriture de personnages variés, inclusifs, et respectueux des minorités”, Game Impact (consulté le 14/09/2024)

4 – Sortir du modèle consumériste ?

Une étude récente [1] a montré que 32,7% des jeux acquis sur Steam n’ont jamais été joués. Aujourd’hui, l’offre dépasse largement la demande et le temps de jeu moyen disponible par joueur et joueuse. Dans ce contexte, il serait préférable selon nous de réduire cette cadence.

La plupart des gros studios ont encore du chemin à faire malheureusement, eux qui poussent vers du toujours plus beau, toujours plus grand, et avec des pratiques de vente souvent douteuses (micro-transactions, jeux service…). Des arguments de vente qui font souffrir leurs équipes et poussent l’industrie à prendre de moins en moins de risques.

Dans notre idéal, on aimerait plus de jeux différents, finis, respectueux de notre temps, et créés dans de bonnes conditions.

Cet idéal peut être en partie induit par nos choix, notamment en adoptant une pratique raisonnable d’achat : n’acheter que les jeux qu’on veut absolument faire ou soutenir. Le retour croissant des démos que l’on observe aujourd’hui peut également être une bonne idée pour tester les jeux avant de les acheter.

[1] – Simon Carless, “How many PC games get bought – but not played?”, The GameDiscoverCo newsletter, 04/03/2024 (consulté le 21/12/2024)